Amour de voyage : trouver l’amour à l’étranger et voyager à deux

12.02.18

Elle venait tout juste de quitter le Canada, d’emménager à Bournemouth et de décrocher une job de barmaid au Sharkeys. Il rattrapait le temps perdu avec ses amis au Sharkeys après un voyage de deux mois en Australie. Ils se sont rencontrés, ils ont parlé et… on connaît la chanson! Quatre ans plus tard, Matt, 26 ans, et Ally, 24 ans, sont toujours ensemble et s’aiment autant qu’ils aiment voyager. Depuis, ils ont parcouru l’Europe et le Canada. Ils sont actuellement en Australie et tu peux suivre leur périple sur Instagram et sur leur blogue.

On a interrogé les tourtereaux pour savoir ce que c’est que de tomber amoureux avec quelqu’un d’un autre pays et de voyager en couple. On leur a posé les mêmes questions séparément et  les réponses, bah... elles donnent envie de tomber amoureux et de prendre la route!

Qu’est-ce qui est le plus difficile quand on voyage en couple?

MATT :  Je crois que c’est la façon dont les autres te traitent. Quand j’étais célibataire et voyageais en Australie, j’étais tout le temps entouré de plein de monde. De purs inconnus s’approchaient pour me parler et je faisais la même chose. En couple, c’est différent. Si on est assis ensemble, presque personne ne vient nous parler. Même quand on se force pour discuter avec d’autres gens, ils sont souvent plus distants quand ils réalisent qu’on est un couple.

ALLY :  Le manque d’intimité. En auberge, on est toujours entourés de voyageurs et ça donne l’impression constante d’être observé. On est deux personnes très sociables, mais des fois, un petit souper tranquille ou une soirée cinéma et pizza sur le sofa comme à la maison, ça se prendrait bien.

Qu’est-ce qui est le plus agréable quand on voyage en couple?

MATT :  Avoir quelqu’un avec qui vivre l’expérience. En voyage, il y a tellement de moments qu’il faut avoir vécus pour comprendre. Le fait de les partager avec quelqu’un, ça change tout. Ally et moi, on se rappelle différentes aventures tous les jours. Les souvenirs paraissent plus tangibles parce qu’il y a toujours deux versions à la même histoire.

ALLY :  Ce que je préfère, c’est de vivre chaque expérience en voyant les expressions de Matt et l’émotion dans ses yeux. Ça peut sembler stupide comme ça, mais quand je le vois sourire à pleines dents parce qu’on vient de tomber sur un petit casse-croûte secret, devenir rouge tomate à force de trop rire ou rester bouche bée devant un autre coucher de soleil… je me dis que voyager en couple en vaut vraiment la chandelle!

Quel est ton plus beau souvenir de voyage jusqu’à maintenant?

MATT :  En octobre dernier, on a voyagé en autobus entre Vancouver et Jasper pendant huit jours. On est arrivés au lac Louise le troisième jour. Il y avait des montagnes partout et des centaines d’arbres enneigés entouraient le fameux lac turquoise. On était au paradis (même s’il faisait froid!). Je voulais vraiment aller faire du canot, mais apparemment que c’est impossible après l’Action de grâce. Il aurait fallu arriver quelques jours plus tôt.

On marchait autour du lac lorsque j’ai vu quelqu’un dans un canot rouge accoster à environ 30 mètres de nous. On s’est approchés pour savoir où il avait pris son équipement. Il nous a expliqué qu’il étudiait à Calgary et qu’il avait conduit jusqu’ici, canot sur le toit, pour faire des photos pour un de ses cours. On lui a demandé si on pouvait louer son canot le temps de quelques coups de pagaies, mais il était si gentil qu’il a refusé notre argent. On lui a finalement donné 40 $ (la location revient habituellement à 105 $ de l’heure, alors c’était toute une aubaine!). Je lui ai prêté ma caméra et il a même pris quelques photos de nous. On a su plus tard que c’était un photographe professionnel avec des milliers d’abonnés sur les réseaux sociaux (!!).

 Les souvenirs paraissent plus tangibles parce qu’il y a toujours deux versions à la même histoire.

Le lac était paisible et silencieux, l’air était frais. Nous étions seuls. Après des heures dans un autobus et des dortoirs pleins à craquer, on avait finalement un moment à nous. C’était parfait. L’eau était si claire. La vue sur les montagnes était difficile à battre du milieu du lac. J’ai l’impression qu’on a passé des heures sur le lac, alors qu’on y est restés que quinze minutes. C’est sans doute mon meilleur souvenir jusqu’ici.

ALLY :  En Australie, on a dormi une nuit aux monts Grampians avec une amie canadienne. À l’auberge, on nous avait recommandé d’aller voir le coucher de soleil à Reeds Loukout à 20 h 40. On est parti à 20 h. En chemin, on a aperçu un kangourou et, comme on n’en avait jamais vu à l’état sauvage, on est sortis de l’auto en courant pour le photographier. On l’a suivi un moment pour réaliser qu’il y en avait plein d’autres pas tellement loin. En tout, on a compté 29 kangourous. On a même vu des bébés!

J’aurais passé toute la soirée à les regarder, mais on a repris la route pour aller voir le soleil se coucher. Il descendait rapidement et j’avais peur de le manquer. On est arrivés juste à temps pour le coucher de soleil. On nous avait recommandé un endroit où les touristes vont rarement et c’était spectaculaire. On a regardé le soleil descendre sur la forêt tropicale. Le ciel changeait de couleur, passant du rouge au orange, puis au violet. C’est un moment unique que je n’oublierai jamais.

Quels sont tes trois meilleurs conseils pour un couple qui voyage à long terme?

MATT  :

  1. Ne force pas l’autre personne à faire quelque chose qu’elle ne veut pas, respecte sa décision.
  2. Ne passez pas chaque minute de la journée ensemble. On essaie de ne pas s’asseoir l'un à côté de l'autre quand on est en groupe. Ça aide vraiment à ce que les voyageurs nous traitent comme des individus et non comme un couple.
  3. Communiquez. C’est probablement la chose la plus importante pour un couple de toute façon, mais ce l’est encore plus dans un contexte de voyage.

ALLY  :

  1. Interagissez avec d’autres gens. Ça peut être intimidant d’approcher un couple. Soyez ouverts à l’idée de rencontrer de nouvelles personnes.
  2. Divisez les responsabilités. Même si on peut avoir tendance à faire les choses en fonction des forces de chacun, on forme une meilleure équipe quand on interchange et sépare les tâches.
  3. Le décalage horaire peut être assez nocif. Apprenez à reconnaître les effets physiques et émotionnels qu’il a sur vous. Les premiers jours donnent souvent le ton au reste du voyage que vous allez passer ensemble.

Comment est-ce qu’on entretient la flamme quand on voyage à petit budget?

MATT :  On n’est pas du genre à dépenser une fortune pour passer une soirée romantique. On essaie de sortir des sentiers battus et on laisse souvent mère Nature nous inspirer. Pour nous, jouer dans la neige, faire du canot sur le lac Louise, se raconter des histoires autour d’un feu en pleine forêt ou passer la soirée à regarder les étoiles peuvent devenir romantiques. En Australie, on marchait sur la plage, on se baignait dans la mer, on se douchait sous une chute d’eau… mais ce que l’on préfère, c’est regarder le coucher du soleil ensemble. On ne célèbre jamais la Saint-Valentin, mais cette année, on va passer le 14 février à faire du parachute à Mission Beach, à Queensland.

ALLY :  On n’a pas besoin de dépenser, de se mettre sur notre 31 et de boire du champagne dans un bar fancy pour passer un moment romantique. Ça fait un bout qu’on ne l’a pas fait, mais des fois, on va pique-niquer sur la plage en soirée. On apporte une couverture, de quoi grignoter, une bouteille de vin, des chandelles et un haut-parleur pour écouter de la musique. Le soir, la plage est calme et souvent déserte. C’est romantique et c’est le genre de soirée qui nous ressemble. J’adore ça.

Comment gérez-vous les conflits?

MATT :  On s’obstine juste sur des affaires ridicules, comme sur la façon de prononcer certains mots (yogourt revient constamment), ce qu’on va manger pour souper (soit comment on va choisir d’assaisonner les pâtes), qui dort dans le lit du bas, qui s’assoit au bord de la fenêtre, qui doit se changer quand on s’habille pareil sans le vouloir et qui doit faire du thé ou du café le matin. Après un moment, si la dispute persiste, on fait un duel de danse. Un des deux se met à danser jusqu’à ce que l’autre embarque. Ça a l’air con, mais c’est impossible de ne pas rire et tu te rends compte à quel point tu te chicanes pour rien.

ALLY :  On se chicane pour des niaiseries : à quelle heure se lever le matin (j’hais les alarmes), quoi manger pour souper (pas encooore des pâtes au thon) ou qui utilise l’iPad lent (on se le passe chacun notre tour). Que ce soit à la maison ou en voyage, il faut parler et trouver des compromis. Si on ne trouve pas de solution, on se met à danser. Un des deux commence et l’autre doit répéter les mêmes mouvements. Ça nous fait rire et ça détend l’atmosphère. On parle plus calmement et on se rend compte qu’on se chicane un peu pour n’importe quoi.

Avez-vous découvert certains traits de caractère ou des bêtes noires chez l’autre en voyageant ensemble?

MATT :  Quand on va à l’épicerie, Ally veut toujours acheter un ingrédient qu’on ne pourra pas trimballer et qu’on va gaspiller (comme une bouteille de sirop d’érable à 8 $ qu’on va devoir finir en 24 heures ou laisser à l’auberge pour qu’un autre voyageur en profite). Quand on fait notre sac pour la journée, Ally dit toujours « Bah, je n’ai pas besoin de manteau, il fait chaud ». Elle oublie que ça se rafraîchit en soirée et finit par prendre en otage le coton ouaté que j’avais soigneusement paqueté. Ça arrive quelques fois par semaine.

Après un moment, si la dispute persiste, on fait un duel de danse.

ALLY :  Dernièrement, Matt a développé un nouveau trait de personnalité qu’on appelle GPS Matt. Comme un GPS, il prend les rênes et trouve la façon de se rendre à destination. Il est vraiment bon. Même si j’y mets du mien, à un moment ou à un autre, il prend la relève et trouve toujours un raccourci.

Jusqu’à maintenant, le fait de prendre ma serviette est sa seule bête noire. Matt emprunte la mienne parce que la sienne est bien pliée dans le fin fond de son sac. Quand on va à la plage, il laisse souvent la sienne à l’auberge. On partage donc la mienne et je me retrouve pleine de sable parce que je ne peux pas vraiment m’étendre comme il faut. Matt a deux serviettes, mais il semble préférer la mienne. Je ne comprends toujours pas cette étrange fascination.

Arrivez-vous à passer du temps chacun de votre côté en voyage?

MATT :  La plupart du temps, on est ensemble. Par contre, c’est important d’avoir un petit moment en solo tous les jours, et même si ce n’est qu’une demi-heure pour se promener un peu ou parler avec d’autres voyageurs. Actuellement, on ne travaille pas, mais après notre voyage sur la côte est de l’Australie, on planifie trouver du travail. On sera donc séparés une bonne partie de la journée et ça nous donnera de quoi jaser sur l'heure du souper.

Est-ce que c’est plus difficile de rencontrer des gens quand on voyage en couple?

ALLY :  On fait toujours un effort pour sembler ouverts aux rencontres et ne pas trop avoir l’air d’un couple. On fait attention de garder une certaine distance, de s’asseoir l’un en face de l’autre à table et de parler aux gens autour de nous plutôt qu’entre nous. Quand on joue aux cartes ou qu’on prend un verre, on invite les voyageurs à se joindre à nous. J’ai l’habitude de piquer des jasettes dans la cuisine de l’auberge, dans le dortoir, dans l’autobus ou même à la plage. Tout le monde n’est pas toujours prêt à ça! On passe beaucoup de temps ensemble, mais c’est souvent nous qui approchons les autres.

Mon conseil pour les couples en voyage : moins de démonstrations d’affection en public et être sympathique! Vous devrez peut-être faire les premiers pas, mais c’est normal, il faut persévérer. Participez à des activités de groupe et prenez le temps de connaître les gens individuellement.

Qu’avez-vous appris de nouveau sur le pays d’origine de l’autre?

MATT :  L’animal national est le castor, le sport national est la crosse et il ne neige pas à longueur d’année. Je n’ai même jamais vu de neige en Ontario et il a fait 35 degrés pendant notre voyage à Québec. J’ai plus bronzé au Canada qu’en Australie! Le Tim Hortons, c’est comme une religion; je pense que bien des Canadiens donneraient leur vie pour une boîte de Timbits. Ma seule déception a été de ne pas voir d’orignaux. J'étais certain qu’il y en avait partout, mais ils sont plutôt difficiles à trouver. Je n’ai vu qu’une femelle, donc sans bois, alors ça reste sur la ma liste de choses à voir.

Je pense que bien des Canadiens donneraient leur vie pour une boîte de Timbits.

ALLY :  Je ne suis pas fan de café et je n’ai commencé à boire du thé qu’en 2011, après mon premier voyage en Angleterre. Même si j’aimais ma propre version, Matt m’a montré à faire du vrai thé anglais. J’ai passé une bonne partie de ma vie à faire du thé de la mauvaise façon sans le savoir! C’est un processus avec des étapes précises, un ordre à suivre. Il ne faut pas laisser le sachet dans la tasse, sinon c’est foutu. Je trouvais ça vraiment drôle au début, mais maintenant, je respecte l’art du thé. Je ne laisse même plus ma mère m’en préparer un (désolée, maman…).

Anecdote : c’est en retournant au Canada que j’ai réalisé à quel point je me sentais à l’étroit en Angleterre. Effectivement, la superficie du Royaume-Uni est 41 FOIS plus petite que celle du Canada!

Le Canada et le Royaume-Uni se ressemblent sur plusieurs points. Avez-vous été surpris par certaines différences culturelles?

MATT :

  • Au Royaume-Uni, le prix indiqué sur les produits est le prix que tu paies. Au Canada, tu dois ajouter la taxe, qui varie d’une province à l’autre.
  • Au Royaume-Uni, on donne du pourboire de façon volontaire et seulement quand on reçoit un service exceptionnel. Au Canada, on doit donner 15 % de pourboire pour un repas ordinaire. Ça monte parfois même à 20-25 % si le service était remarquable. Si on a eu une mauvaise expérience, on doit quand même donner un 10 % et le pourboire est ajouté automatiquement quand il s’agit d’un groupe.
  • Au Canada, les gens sortent prendre un verre. Si tu n’habites pas dans le centre d’une grande ville, tu dois conduire pour aller au bar le plus près, ce qui veut dire que tu ne peux vraiment pas prendre plus d’un verre. Au Royaume-Uni, ça ne vaut pas la peine de sortir si tu ne vas pas prendre au moins quatre verres.

ALLY :  Je pense que notre plus grande différence culturelle est l’accent et la façon dont on prononce et utilise certains mots. Water bottle est un de nos préférés. D’autres mots comme vitamins, status ou data nous font toujours rire.

Qu’est-ce qui vous attend une fois le voyage terminé?

ALLY :  On vient de faire notre sac pour un voyage autour du monde, alors on pourrait bien voyager pour les cinq prochaines années. Je voyagerais avec Matt toute ma vie si c’était possible!

Je voyagerais avec Matt toute ma vie si c’était possible!

Matt peut encore obtenir un visa vacances-travail pour le Canada et ça sera le dernier endroit où on ira avant de s’installer de façon permanente et fonder une famille. Matt devra décider s’il aime vivre au Canada, s’il peut endurer nos hivers et s’il peut vivre loin de sa famille. Le plus important, c’est d’être ensemble.

MATT :  Avec les restrictions sur les visas, on ne sait pas où on va s’installer plus tard, mais on pense voyager encore longtemps. Après, je ferai une demande pour un visa de travail de deux ans au Canada et on en profitera pour voyager aux alentours.

Je ne pense pas qu’on arrête de voyager un jour, car on vient de deux pays différents et nos familles y vivent toujours. On va continuer de bouger jusqu’à ce qu’on n’ait plus d’options. Quand on sera rendus là, on choisira l’endroit qui nous semble le mieux pour élever une famille. Pour l’instant, ma maison n’est pas un endroit fixe, mais une personne.

Suis les voyages de Matt et Ally sur leur blogue, Borderline Backpackers, et sur Instagram.

Cet article fait partie du
Numéro 3

Histoires de coeur